Abderrahmane Zenati : C'est mes ouvrages qui ont donné l'idée à Najet M'jid de créer son association Bayti.
C'est mes ouvrages Les Cigognes Reviendront-elles à Oujda et Mémoire de la Fourmi qui ont donné l'idée à Najet M'jid de créer son association Bayti. Cétait en 1993. j'étais à cette époque marié avec la gynécologue Zoubida Ellourhaoui.
La jeune pédiatre, Najet, encore inconnue, venait chez nous, au quartier palmier, rue Mignard, pour vacciner nos enfants.
Je commençais à cette époque à écrire mon autobiographie, et comme je n'étais jamais en classe et que mon manuscrit était plein de fautes de grammaire et d’orthographe, je profitais de la présence de Najet chez nous pour lui demander de me corriger mes écrits.
Et la jeune pédiatre qui, jusque-là, n'avait aucune idée sur le calvaire des enfants de la rue, ne cessa les jours suivants de m'interroger sur mon enfance et sur le drame que j'ai vécu.
Alors pendant des jours et des jours je ne faisais que lui parler de mon passé d'enfant de la rue... Elle m'écoutait religieusement en allumant cigarette sur cigarette... J'étais, à cette époque, ami avec feu Mohamed M'jid, le président de la Fédération royale marocaine de tennis, homme altruiste qui m'avait beaucoup aidé et qui m'avait invité à exposer mes toiles dans son club, Najet venait me chercher dans ce lieu pour me poser des questions sur les enfants de la rue.
... Et c'est mon histoire vécue qui, en 1994, lui a inspirer la création de Bayti, association à la vocation de réintégrer les enfants des rues... Et c'était là le moyen qui a aider cette Najet, pédiatre que personne ne connaissait, à sortir de l’anonymat et faire d'elle l'une des administrateurs de la Fondation Mohammed-VI, chargée de la réhabilitation et de la réintégration des mineurs et des adultes en conflit avec la loi. Elle est aussi un membre du Conseil consultatif des droits de l’homme et consultante pour divers organismes (UNESCO, UNICEF, Union européenne).Bayti emploie aujourd’hui 51 salariés et 20 bénévoles... Lorsque j'ai rencontré un jour cette Najet dans un célèbre club de travaux publics à Rabat, en compagnie du chanteur Malek, elle avait fait semblant de ne pas me connaitre du tout...C'était comme si elle n'avait jamais parler ni corriger mes ouvrages... Ainsi, la misère dans laquelle j'ai vécu et dans laquelle je patauge encore, à aider cette dame à être ce qu'elle est devenue...D'ailleurs elle n'est pas la seule, n'est-ce pas monsieur Nabyl Ayouch? ...
Voici un extrait de mon ouvrage autobiographique MÉMOIRE DE LA FOURMI : que Najet m'avait corrigé...
"... Ce n'est pas moi qui ai décidé d'être peintre, c'est la peinture qui m'a choisi dès ma tendre enfance... J'avais un peu plus que dix ans et, orphelin, je vivais dans la rue à Oujda comme des centaines d'autres enfants abandonnés, filles et garçons... Je dormais sur des morceaux de carton à la belle étoile et je me nourrissais des restes dans les poubelles.
Maigre comme un clou, crasseux et vêtu de guenille je pataugeais jusqu'au cou dans le froid et la peur... Oui, je n'ai rien oublier de cette misère dans dans laquelle j'étais condamné dès l'aube de ma vie... Je n'ai pas oublier que pour subsisté, je mangeais n'importe quoi...Tout ce que je trouvais comme mangeable dans les poubelles et les décharges publiques.
Je me rappelle un matin, pas comme les autres. Il n'était pas encore sept heures et il faisait très chaud. Le vent du Sud soufflait par rafales. Il me desséchait les lèvres, raccourcissait ma respiration et faisait bouillir le sang dans mes veines. En cherchant quelque chose à manger dans une poubelle, devant une porte d'une riche famille française, face au cimetière chrétien, j'ai trouvé une vieille boite de peinture à l'eau, déjà entamée...
En étalant, par instinct, de la couleur avec mes doigts sur un vieux carton, j'ai vu apparaître des couleurs qui m'ont ravi.
Les mélanges obtenus par hasard m'avaient fasciné... D'un blanc et d'un rouge, un rose parut par enchantement... D'un bleu et d'un jaune un vert prit forme...
Ce fut pour moi une immense joie. Cette découverte m'amusa et occupa mon esprit. Elle m'avait fait oublier pendant quelques instants ma faim et ma désolation.
Ce mélange des couleurs a été le déclic qui déclencha spontanément ma passion et ma sensibilité pour la peinture ...
Plus tard, toujours par instinct, par amour, par plaisir, je passais des heures à noircir les murs avec du charbon en dessinant les personnages de bandes dessinées : Zorro avec son masque, des cow-boys sur des chevaux, des indiens coiffés de leurs plumes, Tarzan et ses animaux sauvages... Lions, singes, éléphants, girafe...
Je dessinais n'importe quoi sur n'importe quel support, surtout sur les portes des écoles...
Cela émerveillait les enfants de chaque cartier que je fréquentais.
J'avais compris alors que grâce au dessin, les enfants des familles riches acceptaient ma présence parmi eux. Mes modestes talents artistiques me permettaient de partager leurs jeux, leurs discussions et leur goûter...
Au fond de moi-même quelques choses s'étaient ancrées ou avaient bourgeonné.
Je me sentais devenir autre.
Il s'est produit un remarquable revirement chez les parents de mes petits camarades, quand ils ont vu mes dessins... Quand ils se sont rendu compte que je n'étais pas le monstre qu'ils imaginaient et, au contraire, avaient découvert en moi une sensibilité et un soupçon de don, ils me témoignèrent de la sympathie et les sourires avaient remplacés les brimades...
Les mots d'encouragement s'étaient succédé aux injures.."
Les Cigognes Reviendront-elles à Oujda?
Extrait:
"... Non !… Ce petit garçon que je revois dans la nuit, seul, affamé, tremblant de froid et de peur ne peut être moi ! Qui est ce petit enfant brun, maigre, fragile, avec sa taille squelettique et son corps décharné que je revois dans mes souvenirs ? ... Ce petit qui n’a que la peau sur les os. On eut dit un squelette échappé d'un cimetière ayant quelques lambeaux de peau humaine, n’est certainement pas moi … Cette petite tête, ces deux yeux, immenses, d'une étrange couleur donnant sur le noir, en perpétuel mouvement de curiosité sont-ils miens ? Non, ce n'est certainement pas moi ce gamin, abandonné à l'aube de son enfance, que je revois errant dans les rues d'Oujda avec les vagabonds, les mendiants, les fous et les brigands…"
Non, je n’ai rien oublié !…
Comme si c’était hier, je me rappelle tout...
C’était bien moi ce petit vagabond qui évoluait dans des milieux hostiles. Dans la souffrance et la solitude de cette enfance déchirée, je n’étais préoccupé que de survivre… Je vivais comme un chien sans maître dans les rues malfamées d’Oujda…Battu par les uns, harcelé par les autres, souffrant de la famine, du froid, du fouet et des sévices des artisans… Dans mon enfer, je n’avais jamais cessé de m’interroger sur mon existence et mon rôle dans la vie.
A travers mes vagabondages, j’ai connu l’oppression des forts, la tyrannie des pauvres, la maladie et la gueule hideuse de la mort…"
Quelques commentaires de mes lecteurs et lectrices:
Notre ami Abderrahmane est beaucoup plus HAUT que toutes ces basses personnes.
Tu les aides à gravir les échelons ,une fois au sommet ,ils tirent aux oubliettes les bons moments et les souvenirs partagés !
Allons nos amis
Le maximum de partage
Tu es un homme merveilleux Abderrahmane Zenati ne l'oublie jamais